CONSULTEZ VOTRE SANTEPourquoi la météo a une énorme influence sur votre santé et état d'espirit By Robert Sarner, Europe magazine, Fevrier 1981 [A research institute in Holland delves into the huge impact (postive and negative) that weather has on your health and state of mind] Pourquoi les cas d'insomnie et de migraines ése multiplient-ils curieusement et les hìpitaux s'emplissent-ils brusquement quand soufflent certains vents? Pourquoi les changements brutaux de tempéérature et de pression atmosphérique provoquent-ils peut-àtre des crises cardiaques et des accidents cardio-vasculaires? Pourquoi l'activité sexuelle masculine s'intensifie-t-elle pendant la pleine lune? Pourquoi les enfants nés en été ont-ils souvent un Q.I. plus élevé mais une personnalité moins extravertie que ceux nés en hiver? Réponse: la biométéorologie. L'homme moderne ne manque vraiment pas de soucis. Entre la crise économique, la menace d'une nouvelle guerre mondiale, les centrales nucléaires, le prix ou la qualité, en France, de la baguette de pain, la coläre des ayatollahs, son moral a de quoi chavirer. Pourtant, un autre ennemi le guette sournoisement: la météo. C'est du moins ce qu'affirme le docteur Solco Tromp. Selon ce Néerlandais, nous sommes prisonniers des variations du temps. Intrigué par ses observations faites dans différentes parties du monde sur la relation entre les maladies et l'environnement, le docteur Tromp abandone ses travaux de géophysicien en 1956. Conseiller scientifique pour les Nations Unies, il fonde alors le Centre de recherches en biométéorologie. Dans une petite maison d'une rue résidentielle à Wassenaar, präs de Leiden, aux Pay-Bas, le Centre élabore ses propres projets et, en màme temps, recueille les travaux des autres scientifiques du monde entier engagés dans la màme voie. Tandis que beaucoup de pays s'équipent d'une armada de satellites pour mieux prédire le temps qu'il fera demain, l'homme commence seulement à deviner qu'on peut prévoir plus que les simples intempéries. Aujourd'hui, des chercheurs comme Tromp dressent une sorte de vaste inventaire d'observations troublantes. Leurs témoignages ne peuvent que confirmer un vieux soupáon : notre santé et notre comportement sont en grande partie conditionnés par le climat et rythmés par les saisons. Ces rapports entre la météo et la santé font aujourd'hui l'objet d'une investigation scientifique connue sous le nom de biométéorologie. La communauté scientifique traditionnelle a plutìt tendance à traiter ce tout jeune domaine d'études avec un certain scepticisme parce que la plupart de biométéorologistes ne sont pas des docteurs en médicine. En fait, quelques scientifiques considärent màme la biométéorologie comme une branche du surnaturel tout comme l'astrologie. DêJ_ HIPPOCRATE« Ce que nous faisons, c'est de la recherche sur l'environnement, » explique Tromp d'une voix douce. Mais cela n'a rien à voir avec la pollution; un probläme grave en soi mais qui a souvent moins d'effets biologiques sur l'homme que le temps et les saisons. Il n'y a guäre d'organe ou de fonction dans le corps qui puisse échapper aux effets des changements de temps. » Si cette science est encore jeune, son hypothäse théorique ne l'est pas. Déjà, vers l'an 400 av. J.C., en Gräce, le plus grand médecin de l'Antiquité, Hippocrate, apprenait à ses étudiants que l'homme était plus ou moins vulnérable à certaines maladies selon le moment de l'année. Pourtant, il aura fallu attendre presque 24 siäcles pour que cette observation devienne une science et se développe à pas de géants : la Société internationale des biométéorologistes est fondée à Paris en 1956 et siäge à l'Unesco. Ceci un an apräs la création du Centre en Hollande. Aujourd'hui, cette Société est formée de präs de 500 membres de 55 pays. Selon Tromp, ce sont les montées ou descentes brutales de la température et de la pression atmosphérique qui nous touchent le plus. Mais comment savoir qui sera victime des variations du thermomätre? Qui est sensible au temps, qui ne l'est pas? Nous le sommes tous plus ou moins, bien que les personnes Égées, fragile, soient plus vulnérables. Ainsi certaines maladies répondent-elles plus que d'autres aux conditions atmosphériques, comme la bronchite, la tuberculose et l'asthme, sans compter les maladies cardio-vasculaires et articulaires. Toutefois, il est possible de savoir si on risque de souffrir des caprices du temps. Tout dépend du fonctionnement de votre « thermorégulateur » : une petite partie de l'hypothalamus, une glande située dans le cerveau, permet au corps de s'adapter aux changements de température. Si votre thermorégulateur fonctionne mal, vous souffrirez sans doute de ce que Tromp appelle « le stress du temps ». En 1964, Tromp a inventé une méthode simple pour évaluer l'efficacité du thermorégulateur. On plonge le bras et la main du sujet dans une cuve d'eau glacée. Au bout de deux minutes, on sort le bras et on prend la température de la paume toutes les quinze secondes. Il suffit ensuite d'établir une courbe jusqu'au moment oó la main retrouve sa température normale. « Chez une personne saine, » explique Tromp, « la température du corps s'éläve lentement et revient à la normale au bout de six minutes. » Mystérieusement, les courbes de réchauffement de ceux qui souffrent de certains désordres physiques et mentaux sont irréguliäres, lentes et chancelantes. Par exemple, quelqu'un qui souffre d'asthme ou de bronchite met 15 minutes - et d'une maniäre saccadée - pour retrouver sa température normale. Le docteur Tromp reconnaåt loyalement que ses études sur la thermorégulation ont posé plus de questions qu'elles n'en ont résolu. Par exemple, une mauvaise thermorégulation est-elle la cause d'une maladie ou un symptìme? Dans plusieurs cas, le « stress du temps » serait plutìt une cause qu'un effet. Dans d'autres expériences, Tromp montre également d'autres conséquences sur notre organisme des fluctuations du temps : la tension du sang, le temps de coagulation, le niveau des minéraux « trace » et de la vitamine C, le taux de la sédimentation sanguine et le nombre des globules blancs. Des centaines de biométéorologistes de plusieurs pays abondent d'ailleurs dans le sens de Tromp. Ils ont de quoi àtre fascinés. Quelques exemples : la température moyenne annuelle paraåt liée aux affections malignes de l'intestin, du rectum, de l'estomac et des reins. En Europe occidentale, le schizophränes sont plus agités aux mois de novembre, décembre et janvier ; les ulcäres s'aggravent souvent brusquement en hiver ; pendant la pleine lune, le nombre de meurtres augmente, tout comme le désir sexuel ; les tentatives de suicide atteignent leur paroxysme les jours oó le temps passe brusquement du froid au chaud, surtout si ces changements sont accompagnés de neige ou de pluie. C'EST LA FAUTE AU VENTUne autre observation, träs compläte, concerne les vents aux effets sinistres. C'est-à-dire les vents chauds et secs qui laissent derriäre eux des victimes agitées, fatiguées : le sirocco en Italie, à Malte et en Corse ; le mistral en France ; le f_hn en Allemagne, en Suisse et en Autriche ; le sharav en Israâl, le chinook au Canada ; le santana aux Etats-Unis et le zonda en Argentine. Toute une famille redoutable qui provoque nervosité, angoisse, apathie sexuelle et cauchemars. Les cardiaques se sentent oppressés, le nombre des crimes et des suicides augmente. En Allemagne, pendant le f_hn, les docteurs évitent - sauf urgence - les opérations de chirurgie lourde. En Israâl, les condamnés bénéficient de circonstances atténuantes s'il est prouvé que le sharav soufflait au moment de leurs forfaits. Seule explication - supposée - de ces effets : la turbulence de l'air, oó se trouvent des particules chargées d'électricité, mieux connues sous le nom de « ions ». Malgré ces constatations troublantes, de nombreux scientifiques prétendent encore que nos corps sont des sortes de machines imperméables aux caprices du temps. « La biométéorologie est un domaine encore tellement inconnu, » explique Tromp, « que certains la rejettent automatiquement. En fait, les médecins sont souvent les plus sceptiques. Plus émotionnellement qu'intellectuellement. A la faculté, personne ne leur a appris à observer les influences de l'environnement. Et puis, il est toujours plus facile de prescrire une ordonnance que de tenir compte du temps. » Et le débat se poursuit. Mais une chose est certaine : la météo n'est plus seulement un sujet banal de conversation. Depuis quelques années, alors que la météo semble de plus en plus s'accommoder des extràmes et n'inventer que des catastrophes, l'homme, créature fragile, n'en finit plus de s'interroger sur tout ce qui bouleverse le plus mystérieux de ses royaumes : lui-màme. |
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